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EQUITATION ESSENTIELLE
5 novembre 2014

EQUITATION DE TRADITION FRANÇAISE : LES ASPECTS JURIDIQUES D'UNE POLITIQUE DE SAUVEGARDE

EQUITATION DE TRADITION FRANÇAISE
WP 3 — 06/11/2014

 

 

 

 

"VIABILITÉ EFFECTIVE"
DE L’ÉQUITATION DE TRADITION FRANÇAISE

LE CADRE JURIDIQUE DE L’ACTION

par Bernard Mathié ©

 

 

 

Synthèse : La Convention de l’Unesco pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel du 17 octobre 2003 a été approuvée par la France le 11 juillet 2006 pour entrér en vigueur le 11 octobre de la même année.

 Avec les différentes dispositions règlementaires prises par le Ministre de la Culture et de la Communication, la Convention de l’Unesco forme le cadre juridique de la procédure de sauvegarde des patrimoines français inscrits, et, plus particulièrement, de l’Equitation de Tradition Française, inscrite sur la Liste Représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité par décision du Comité Intergouvernemental du 29 novembre 2011.

 L’ensemble des obligations nées à la charge de la France est énoncé au titre III de la Convention. Il s’agit, pour l’essentiel d’obligations de moyens et de recommandations. La sanction du non accomplissement de ces obligations serait l’exclusion éventuelle du patrimoine de la Liste Représentative pour n’avoir su prouver la pertinence de son inscription dans la durée.

 

 

 

Les réserves exprimées par l’Organe Subsidiaire chargé de l’instruction du dossier déposé par la France pour l’inscription de l’Equitation de Tradition Française soulèvent des aspects d’ordre divers et de nature complexe.

En tout premier lieu, et avant tout autre examen, il y a le fait de l’existence, en trame de fond, d’un cadre juridique précis et incontournable : l’Équitation de Tradition Française a été inscrite sur la liste représentative du PCI en prenant appui sur les dispositions d’un accord international. Il s’agit, en l’occurrence, de la Convention pour la Sauvegarde du Patrimoine Culturel Immatériel du 17 octobre 2003.

Conformément à son article 34, cette Convention est entrée en vigueur le 20 avril 2006 à l'égard des États qui avaient déposé leurs instruments respectifs de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion avant une date butoir fixée au 20 janvier 2006.

En vertu de l’article 53 de la Constitution française du 4 octobre 1958, la Convention dont s’agit devait être ratifiée ou approuvée par le Parlement; ce qui a été fait le 11 juillet 2006, soit postérieurement à la date butoir indiquée ci-dessus : elle n’est donc entrée en vigueur en France que le 11 octobre 2006.

La portée juridique de cette approbation parlementaire, conforme au droit international, n’est pas négligeable : la hiérarchie des textes juridiques place en effet à son sommet, les traités et accords internationaux. Cela signifie que les lois internes du pays qui a ratifié ou approuvé un texte de traité ou d’accord international voient leurs dispositions coiffées par celles du texte international. Autrement dit, les lois des États-parties sont nécessairement harmonisées avec les dispositions de la Convention de l’Unesco.

De ce fait, obtenir l’inscription d’un élément patrimonial sur la Liste Représentative en application de la Convention du 17 octobre 2003 crée des obligations pour l’Etat-partie qui a porté le projet et défendu la procédure d’inscription.

Les articles 11 à 15, constituant le titre III de la Convention, sont tout particulièrement dédiés à l’organisation des obligations générées à la charge des signataires.

Chaque État-partie considéré s’oblige à "prendre les mesures nécessaires pour assurer la sauvegarde du PCI présent sur son territoire" et qu’il a précédemment identifié et dont il a dressé le ou les inventaire(s).

En France, la mise en œuvre de la Convention pour la sauvegarde du PCI a été confiée en 2006 à la Mission du patrimoine ethnologique au sein du ministère de la Culture et de la Communication (MCC).

L’Arrêté du 17 novembre 2009 relatif aux missions et à l’organisation de la direction générale des patrimoines a chargé le Département du Pilotage de la Recherche et de la Politique Scientifique (DPRPS) rattaché à la direction générale des patrimoines (DGP) du MCC :

– du pilotage de la recherche dans les domaines des opérations nationales d’inventaire du patrimoine immatériel réalisées par l’État ;

– de la mise en œuvre de la Convention Unesco pour la sauvegarde du patrimoine immatériel (art. 8 IV de l’Arrêté du 17 novembre 2009).

De 2006 jusqu’à 2012 une instance consultative informelle, le Comité technique du PCI, a servi de forum pour l’échange d’informations relatives à la Convention pour la sauvegarde du PCI. Le Comité technique du PCI est progressivement devenu responsable de l’examen et de l’évaluation des dossiers de candidature pour l’inclusion d’un élément du PCI dans l’inventaire du PCI de la France ou pour l’inscription sur une des Listes Unesco. Il rassemblait une douzaine de membres de toutes les administrations concernées. Le secrétariat du Comité était assuré par la Mission du patrimoine ethnologique et la Mission des affaires européennes du MCC.

En 2010, le MCC, en application de l’article 13 de la Convention pour la sauvegarde du PCI, a établi comme organisme compétent pour la sauvegarde du PCI le Centre Français du PCI (CFPCI), adossé au centre de documentation de la Maison des cultures du monde.

Le CFPCI poursuit des missions de sensibilisation et de valorisation du PCI auprès du public (expositions, manifestations, conférences). Il assiste le MCC dans chaque étape d’une inscription sur une liste de l'Unesco : de la sélection au suivi post-inscription des éléments.

Depuis novembre 2013, le CFPCI accueille le siège de l’Association des éléments français inscrits sur les listes de l’Unesco. Il contribue à l’avancement de la recherche relative au PCI. Le CFPCI anime, notamment, un réseau européen d’acteurs du PCI avec l’organisation de séminaires européens portant sur la mise en œuvre des politiques européennes en matière de PCI.

Par ailleurs, l’arrêté du 5 mars 2012 relatif au Comité du patrimoine ethnologique et immatériel (publié au Bulletin officiel du MCC, mars 2012, nº208, p. 17) crée pour une durée de cinq ans le Comité du patrimoine ethnologique et immatériel (CPEI) placé auprès de la direction générale des patrimoines. Ce Comité consultatif examine et émet des avis sur l’inclusion d’éléments du PCI dans l’inventaire national du PCI et sur les dossiers de candidature pour l’inscription sur les Listes de la Convention (art. 2, 1º de l’arrêté du 5 mars 2012). Ces avis font l’objet d’une approbation par arrêté du MCC.

Dans ce cadre juridique quelque peu complexe (la bureaucratie française n’est jamais simple), l’inventaire du PCI présent sur le territoire de la France s’est réalisé en deux temps.

Dans un premier temps, le DPRPS a dressé, dès août 2007, un état des inventaires du PCI existants avant l’approbation de la Convention pour la sauvegarde du PCI (publications, bases de données…). Cet inventaire des inventaires a été nommé "répertoire des inventaires" du PCI. Les inventaires du PCI recensés dans le répertoire des inventaires du PCI sont spécialisés soit dans un domaine du PCI soit dans le PCI d’une zone géographique, par exemple, l’inventaire des théâtres de marionnettes en France.

Dans un deuxième temps, le DPRPS s’est attelé en 2008 à établir l'inventaire du PCI en France. Cet inventaire est conçu comme un processus ouvert et évolutif. Il est alimenté par des enquêtes scientifiques ou par des demandes spontanées émanant de porteurs de PCI. Certaines enquêtes sont confiées à des associations de praticiens qui dressent, avec la participation de scientifiques, un inventaire du PCI qu’ils portent.

Un élément peut être inclus dans l’inventaire du PCI en France s’il  est conforme à la définition posée à l’article 2 de la Convention pour la sauvegarde du PCI ; si les porteurs ont consentis à l’inclusion de l’élément dans l’inventaire.

Les éléments sont inclus dans l’inventaire selon leur appartenance aux domaines suivants : savoir-faire, pratiques rituelles, musiques et danses, pratiques festives, pratiques sportives, jeux, arts du conte.

L’inclusion d’un élément dans l’inventaire du PCI en France constitue un simple recensement. Il n’ouvre droit à aucune mesure de sauvegarde.

Au-delà de ces dispositifs de type règlementaire et/ou purement administratif, l’État-partie s’efforce (la langue diplomatique a de ces subtilités!) "d’assurer la plus large participation possible des communautés… qui créent, entretiennent et transmettent ce patrimoine, et de les impliquer activement dans sa gestion".

Il s’agit en bref :

  • de mettre en valeur la fonction du patrimoine culturel immatériel dans la société;
  • d’instituer un ou plusieurs organismes compétents pour la sauvegarde du patrimoine;
  • d’encourager les études requises et définir les méthodologies de recherche pour une sauvegarde efficace du patrimoine;
  • d’adopter les mesures juridiques, techniques, administratives et financières appropriées visant à :
    • favoriser la mise en place d’institutions de formation à la gestion et à la transmission du patrimoine;
    • garantir l’accès au patrimoine culturel immatériel tout en respectant les pratiques coutumières qui régissent l’accès aux aspects spécifiques de ce patrimoine ;
    • établir des institutions de documentation sur le patrimoine culturel immatériel et à en faciliter l’accès.
  • d’assurer la reconnaissance, le respect et la mise en valeur du patrimoine, en particulier grâce à :de maintenir le public informé des menaces qui pèsent sur le patrimoine ;
    • des programmes éducatifs, de sensibilisation et de diffusion d’informations à l’intention du public, notamment des jeunes ;
    • des programmes éducatifs et de formation spécifiques au sein des communautés et des groupes concernés ;
    • des activités de renforcement, en particulier de gestion et de recherche scientifique,  des capacités en matière de sauvegarde du patrimoine ;
    • des moyens non formels de transmission des savoirs ;
  • de promouvoir l’éducation à la protection des espaces naturels et des lieux de mémoire dont l’existence est nécessaire à l’expression du patrimoine.

Concrètement, les recommandations faites par l’Unesco, tant aux États-parties qu'aux Communautés ou groupes qui s’identifient à travers la reconnaissance d’un même patrimoine culturel immatériel s’inscrivent dans un cadre juridique souple qui autorise une mise en œuvre progressive des objectifs fixés par les textes.

Il faut toujours un commencement à l’action.

Deux chantiers pourraient être ouverts sans autre délai :

celui de la mise en valeur de la fonction de l’Equitation de Tradition Française :

Organiser la communication autour de l’idée que l’Equitation de Tradition Française est la résultante historique des pratiques et de l’enseignement des grands maîtres de l’Histoire de l’équitation en France, du 16ème siècle à nos jours, en distinguant les grands courants d’école (Plan A). À défaut, définir le contenu le plus opportun d’une communication sur l’opportunité de la sauvegarde du patrimoine (Plan B).

celui de la création d’une institution chargée de la sauvegarde de l’Equitation de Tradition Française :

Avant de songer à une structure nouvelle, étudier la possibilité (hypothétique, il est vrai) de confier à une institution existante le soin de gérer la mission de sauvegarde (plan A) : on peut émettre le souhait que cette mission soit dévolue explicitement au Cadre Noir de Saumur[1]. À défaut, définir les conditions juridiques et économiques de la création d’une  structure indépendante faisant à la fois fonction d’observatoire vis-à-vis des groupes de pratiquants et fonction de conservatoire du patrimoine culturel immatériel constitué par l’Équitation de Tradition Française (plan B).

On aura, de la sorte, répondu aux deux premières obligations énoncées par l’article 13 de la Convention. En même temps, on aura d’ores et déjà, en instaurant les outils requis, préparé le terrain à l’exécution des obligations les plus importantes, c’est-à-dire celles qui concernent la gestion, l’éducation et la transmission du patrimoine.

 

 



[1] La difficulté, c’est que la définition des missions de cette institution relève de la compétence du Ministère des Sports et que cette compétence pourrait s’avérer conflictuelle avec les besoins de la conservation d’une tradition équestre dont les contours ne coïncideraient pas avec la conception politique des missions assignées actuellement au Cadre Noir par son autorité de tutelle.

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